"Lucky" est probablement l'un des morceaux les plus étranges du répertoire de Donna, mais il n'en reste pas moins excellent. Il est gravé pour la première fois sur le double-album "Bad Girls" qui sort en 1979, album musicalement très riche. On passe du rire aux larmes, du sexe à l'amour. D'ailleurs, "Bad Girls" fait partie de mon Top 3 des meilleurs albums de Donna Summer, toutes périodes confondues. Beaucoup de musiciens ont collaboré sur cet album, et Giorgio Moroder semble se mettre en retrait, laissant plus de champ qu'auparavant à Pete Bellotte, qui se révèle être un musicien fort doué.
Sur le premier disque de ce double-album, on retrouve 8 morceaux disco, tous dans la même veine rock, à part peut-être "Can't Get To Sleep At Night" qui s'oriente davantage vers un son purement disco. C'est également sur ce premier disque que sont gravés les succès "Hot Stuff", "Bad Girls", "Walk Away" et "Dim All The Lights". Ce dernier titre crée la surprise : il est écrit, musique et paroles, par Donna elle-même. Mais ce n'est pas tout : la diva s'investit comme jamais auparavant sur cet opus, puisqu'elle co-écrit beaucoup de morceaux et écrit seule deux ballades, "There Will Always Be A You" et "My Baby Understands". La face A du second disque, justement, est dédiée à 4 ballades. Et enfin, pour clôturer l'album, on retrouve sur la face B de ce deuxième disque 3 morceaux disco qui dévient vers l'électronique et le bizarre. "Our Love", dont la musique est signée Giorgio Moroder, possède un refrain des plus étranges qui se contente d'une batterie et de la voix de Donna. Sa voix, justement, parlons-en. Majoritairement, Donna chante sur cet album avec son timbre naturel, et sa voix se révèle être extraordinairement puissante, particulièrement sur "Dim All The Lights". Mais dans "Lucky", dont la musique est aussi de Moroder, elle renoue avec sa petite voix sensuelle des débuts. Elle montre ainsi l'étendue de son talent et cloue le bec de ceux qui la surnommaient "le sexe chantant". Oui, on peut faire du disco et avoir du talent.
Pourtant, l'opus "Bad Girls" garde toujours comme ligne conductrice ce thème du sexe, mais il n'est plus simulé, il est seulement sous-entendu dans les paroles, paroles qui racontent la vie d'une prostituée, entre désir et tristesse. Les photos sur la pochette et à l'intérieur de l'album sont toutefois sans ambiguïté : on retrouve une fois de plus Donna dans une tenue des plus dévêtues - cette fois-ci sous un lampadaire - mais à force, ça n'amuse plus : elle aurait dû carrément se mettre à poils, ça n'aurait pas été un grand pas à franchir pour elle, mais ça aurait été une bonne surprise pour nous... Durant l'été 1979, elle donne même une interview dans le magazine porno "Penthouse" de Bob Guccione : pas de photos X, mais elle nous parle de sexe sans tabou.
Mais revenons à l'album "Bad Girls" et parlons de détails plus techniques. Ce double-album est co-écrit par beaucoup de musiciens, disais-je plus haut. En effet, on retrouve la collaboration, entre autres, de Keith Forsey, de Harold Faltermeyer, de Bruce Roberts et de Bruce Sudano, ce dernier étant l'un des membres du trio 'Brooklyn Dreams' et futur époux de Donna (ils se marieront durant l'été 1980). D'ailleurs, sur les photos à l'intérieur de l'album, Donna, grimée en prostituée, pose avec les 'Brooklyn Dreams'. En revanche, aucune trace de Paul Jabara sur ce disque.
Quand on se penche sur les crédits, on retrouve Faltermeyer aux arrangements, et toujours le tandem Moroder/Bellotte à la production. L'album a été enregistré à Los Angeles. Donna Summer dresse également une longue liste de remerciements, qui commence par Neil Bogart et se termine par Dieu. Nous savons en effet que Donna commence à se tourner vers la religion, à cette époque.
Inutile de mentionner que "Bad Girls" sort dans le monde entier, mais signalons qu'il existe un tirage limité de cet album : pour le distinguer des autres, le vinyle est translucide.
Les singles "Hot Stuff" et "Bad Girls" restent aujourd'hui encore les plus vendus de la carrière de Summer. En 1979, ils se sont classés n°1 dans les charts. Le simple suivant, "Dim All The Lights", a lui aussi connu un grand succès.
"Lucky", en revanche, est paru en face B sur certains pressages du single "No More Tears", duo de Summer avec Barbra Streisand, sorti également en 1979.
Ci-dessous, retrouvez Donna qui interprète en live "Hot Stuff" :